« Une certaine qualité de gentillesse est toujours signe de trahison » 

François Mauriac
Le noeud de vipère – Grasset

« Tu sais ma chérie, être gentil c’est être faible et être faible, c’est la porte ouverte à se faire avoir »
disait une grand-mère à sa petite fille qui, elle, a fait sienne cette définition de la gentillesse et  se plait à la transmettre à qui veut bien l’entendre.
 
Je reconnais avoir été, durant ce coaching avec Adriana, la petite fille en question, très concernée par cette affirmation devenue croyance familiale. Tellement concernée que j’ai eu l’idée d’en faire le thème de ce billet.
Les gens qui se disent, se veulent et se montrent gentils m’agacent ! Voilà, je vous l’ai dit.
Si la gentillesse semble se décliner autour de l’amabilité et de l’écoute, elle s’installe également et principalement dans le verbe « faire », sans pour autant visiter le verbe « être » hormis d’être aimable, attentif et bien sûr à l’écoute.
Les gentils vous rendent service même lorsque vous ne leur demandez rien. Ils veulent vous faire plaisir : c’est dire combien ils veulent plaire, vous plaire.
Les gentils font des choses pour vous, ils vous écoutent ou donnent l’impression de vous écouter, ils écoutent si souvent pour répondre mais si peu pour comprendre, ils écoutent avec l’intention de vous aider ou de vous dire comment faire bien. D’ailleurs ils vous le disent « j’ai fait ça pour t’aider », « je voulais te faire plaisir » et ils en attendent, sans le dire et de manière inconsciente, un retour. Pas forcément un « merci », non, plutôt une attitude reconnaissante. Très souvent ils aiment l’affirmer qu’ils sont gentils, certains ajoutent même « trop gentils ». Comment peut-on être TROP gentil ? Cela sous-entend une intention déçue : l’autre n’a pas réagi pas comme prévu ou comme attendu et ne mériterait donc pas autant d’attention, d’écoute et de présence ?
Un manque d’estime de soi, sorte de complexe d’infériorité, pourrait soutenir ce besoin de faire plaisir et de rendre service en prenant le risque de ne pas recevoir en retour le minimum de considération attendue.

En revanche, se montrer gentil serait très différent. « C’est à la portée de tous, même des plus agressifs », me disait un ami, ajoutant, « Cette attitude peut être mise dans la catégorie de l’hypocrisie, mais personnellement je considère cette attitude comme un excellent moyen de défense et de positionnement social. Il s’agit d’être gentil mais conscient. Cela permet de garder la maitrise de toutes relations humaines. »

Je prends le risque de vous énerver en vous disant que je me méfie des personnes dites gentilles.

Je crains qu’elles abusent de moi ! Comment ? En me mettant en état de faiblesse ! Je redoute qu’elles abusent de ma vulnérabilité du moment à leur laisser voir et entendre mon besoin d’être aidée ou aimée, je redoute leurs conseils pour mon bien, je crains leur rapidité à dire ou à faire à ma place pour aller plus vite et sans risque d’erreur, me renvoyant d’un ton un tantinet plus haut – et qui se veut tellement gentil – à mes manques et à leur sens du bien faire ou même de la perfection.

Avez-vous remarqué combien la gentillesse peut se montrer dépourvue de bienveillance ?

Combien de personnes dites gentilles, se montrent impitoyables, pour notre bien et pour plus d’efficacité ou de rapidité, à propos de nos petites défaillances, nos erreurs, nos incompréhensions, nos lenteurs…leur gentillesse nous malmène, nous sermonne avec des phrases redoutables au ton crispé qui se veut léger et gentil, du style « mais enfin, ma chérie, c’est pourtant simple à comprendre » ou « laisses moi faire j’irai plus vite » etc.

    Moi, J’aime La bienveillance.

    Ma définition de la bienveillance s’intéresse au bien-être de l’autre, en prenant en compte ce qui est important pour lui ou pour elle. La bienveillance respecte le mode de pensée et de faire de l’autre sans jugement ni à priori et sans le comparer au sien.

    Quand on est bienveillant, on ne fait rien ! On est là tout simplement. La bienveillance s’adresse à la différence de l’autre, en termes de potentiel et non pas en termes de limites, la bienveillance ne compare pas avec ce qui aurait dû être bien fait ou bien dit. La bienveillance porte un regard valorisant sur l’autre et lui rappelle combien il ou elle est unique et souligne l’importance de son existence.

    La bienveillance, ne s’attarde pas à réparer ce que l’autre a raté ou n’a pas su faire, elle ne cherche pas à aider ni à faire à la place de l’autre … le regard bienveillant invite et encourage à trouver les ressources pour faire et pour réussir, elle encourage l’estime de soi.

    Si la gentillesse évalue et cherche à restaurer ou à remplacer les capacités à faire ou à réussir de l’autre, la bienveillance peut réparer les blessures d’identité, rappelant à l’autre qu’il mérite d’accéder au meilleur de lui-même et qu’il peut réussir.

    Être bienveillant, c’est bien traiter l’autre avec le verbe, le ton et le geste.  C’est le traiter avec le respect dû à une personne de qualité, c’est prendre soin de l’autre, c’est s’intéresser au meilleur de l’autre, accueillir sa différence de penser, ses failles et ses manques comme des points d’appui pour lui permettre d’accéder à sa propre dimension d’excellence sans la comparer à une norme quelconque.

    Être bienveillant, c’est lâcher ses certitudes sur ce qui est bien et ce qui ne l’est pas, sur ce qui est correct et ce qui ne l’est pas, et rappeler à l’autre combien il est unique, plein de capacités, c’est s’enrichir de sa différence de faire ou de penser, sans la juger ni la condamner.

    La bienveillance demande de ressentir de la tendresse pour l’autre et de porter un regard aimant sur le monde.

    C’est sans doute la différence avec la gentillesse.

    Adriana pourrait dire à sa fille, « tu sais ma chérie, la gentillesse n’a de sens qu’accompagnée de bienveillance envers l’autre. »

    Ou lui souffler la phrase de cet auteur inconnu «l a bienveillance n’est ni égoïste, ni intéressée. Elle est simplement généreuse »

    À vos réflexions !

    Et vous qu’en pensez-vous ? Etes-vous bienveillant ? Gentil ? Gentil ET bienveillant ?